Gaëlle (bis)
Je fixais ses yeux bleus, captant enfin son attention. Je glissais mon petit doigt au creux de sa minuscule paume, et elle sera instinctivement le poing. Etonnant, la force que ça, à cet âge-là. Une si petite crevette ! La tenant dans mes bras, je la sentais à peine, avec ses trois kilos. Je l'ai embrassé doucement sur le front, lui ai souris d'un air niais, et ça l'a fait marrer.
"Tu es bâptisé, Sven ?
- Ouais."
Pas que je sois croyant : je ne suis pas trop religion, moi. Mais mes parents m'ont porté au bâptème quand j'étais bébé, plus comme une tradition. C'est que ça se faisait beaucoup, dans l'Avant. Et même si l'influence de l'Eglise n'a fait que décroître durant les dernières décennies avant les bouleversements climatiques, les gens continuaient de se marier à l'Eglise et de bâptiser les bébés. Comme une tradition.
"Pourquoi tu me demandes ça ?
- Eh bien, on pense faire bâptiser Gaëlle d'ici quelques mois.
- Cool, encore une bonne occasion de faire la fête."
Je le pense : mariages et bâptèmes, pour moi, c'est surtout synonyme de buffets et de soirées animées. L'occaz de se fringuer bien, de boire du champagne et de bien bouffer. Faut croire que dans les galeries, on guette la moindre opportunité de faire les cons !
"Et on se demandait si tu accepterais d'être son parrain.
- ..."
Bah ouais, j'ai pas sû répondre autre chose qu'un long blanc. Je m'y attendais pas, à ce coup-là. La petite serrait toujours mon doigt en bavant un sourire innocent. Machinalement, je remettais son petit gilet rose en place, et me demandais pourquoi j'avais des larmes qui montaient vers mes yeux. Sans doute parce que ce n'est pas un choix anodin que celui qu'ils avaient fait, et qu'au final c'était une importante preuve d'amour qu'ils me donnaient en me choisissant comme parrain pour leur petit bout de choux. Je m'empressais donc d'accepter avec enthousiasme, avant qu'ils ne changent d'avis.
Je vais être plus que tonton.
Je vais être parrain.
Ah ah !
Sven Thomasson Vërgson
Second jour d'Avril 2067