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Blanc comme neige...
4 octobre 2007

La porte

"Vërgson, je suis ivre de toi...
- Pardon boss ?
- Tu me saoules !
- Ah..."

C'est un peu tendu, le taf, en ce moment. Et pourtant, on n'est que deux à l'atelier. Tout le monde sait très bien que les problèmes, au boulot, sont majoritairement liés au relationnel. A l'humain. C'est comme en informatique : quand y'a une merde, elle se situe généralement entre la chaise de bureau et le clavier. Je ne sais donc pas comment font les grosses sociétés pour survivre à leurs propres employés : nous, on est deux, et on est déjà pas capables de se gérer. L'atelier ne manque pas de clients, mais il est en péril. Faut avouer aussi que si un seul d'entre nous pète les plombs et claque la porte, l'autre est sacrément dans le caca...

J'y pense, parfois, pas toi ? A claquer la porte. Pouvoir dire "je me barre", observer les regards stupéfaits et vaguement envieux des autres, se draper dans une dignité de bon aloi et sortir comme un prince, libre d'aller où tu veux. Mais où veux-tu aller ? La voilà la question. Quand tu seras sur le seuil, avec la porte derrière toi, tu iras où ? Quand l'adrénaline de cette petite victoire sera retombée, t'en penseras quoi ? Quand le froid de l'extérieur rafraîchira tes esprits, tu regretteras pas ton bureau près du radiateur ? Tu regarderas pas en arrière, cette porte franchie des milliers de fois, en te disant "boarf, allez, j'y retourne, je dirais que c'était une blague" ?

Je sais pas toi. Mais moi je me connais, et je connais ma grande gueule : j'enfoncerais mes poings bien au fond de mes poches, je traverserais la rue dans le froid en rentrant ma tête dans mes épaules, je serrerais les dents, et murmurais pour moi-même :

"Qu'ils aillent se faire fout', je r'viendrais jamais !"

Je m'éloignerais alors dans la lumière faiblissante des réverbères, vers de nouvelles aventures.

"Hé, Vërgson ! Tu me le valides ce plan ou je demande l'avis de ma grand-mère ?"

Bon, en attendant, tu m'excuses, j'ai du taf à terminer.

Sven Thomasson Vërgson
4ème jour d'Octobre 2067

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Commentaires
K
Kebab ?
S
Karaz : comme quoi tu peux AUSSI être une fille délicate. :) Merci pour ce texte, que j'aime beaucoup, et qui colle bien à "l'ambiance", en effet...<br /> <br /> Mlle Bille : ça fait quelques semaines que ce mot résonne en échos, ricochant sur les parois internes de ma boîte crânienne.
M
chiche?
K
Ca m'a fait penser à un poême d'Arthur Rimbaud, je ne sais pas bien pourquoi :<br /> <br /> [i]Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées.<br /> Mon paletot aussi devenait idéal.<br /> J'allais sous le ciel, Muse, et j'étais ton féal :<br /> Oh ! là là, que d'amours splendides j'ai rêvées !<br /> <br /> Mon unique culotte avait un large trou.<br /> Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course<br /> Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.<br /> Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou.<br /> <br /> Et je les écoutais, assis au bord des routes,<br /> Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes<br /> De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;<br /> <br /> Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,<br /> Comme des lyres, je tirais les élastiques<br /> De mes souliers blessés, un pied contre mon coeur ![/i]<br /> <br /> J'aime bien.<br /> <br /> Bon. Concernant le boulot, c'est évident que parfois ce qui nous fait rêver c'est juste l'idée de la liberté, pour elle-même. L'illusion que toutes les options nous seraient ouvertes et que tout resterait à découvrir. Dans les faits, il me semble que pour la plupart on est assez rassuré(e)s par le train-train. Surtout s'il est quand même acceptable.<br /> Et puis, comme tu le suggères, une fois la liberté acquise... on en fait quoi ?
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